3. Le vécu transformé en expérience

FOCUS 
Précédemment, dans le regard sur le monde et la vie que je t’ai proposé, j’ai déploré la faillite de la pensée. La vie et toutes les expériences que tu vas connaître vont pouvoir enrichir ta pensée. Ta vie et ta pensée sont en interaction, la vie enrichit ta pensée, mais la pensée t’aide à vivre. L’interaction est encore une fois présente, elle est décidément une caractéristique première de la vie.

Pour apprendre de la vie il ne suffit pas de vivre ; avoir vécu une situation ne suffit pas pour qu’elle devienne une expérience. L’expérience de la vie et la relation avec le monde doivent être passées à la moulinette de ta « machine universelle à comprendre » et de ta sensibilité. 

Ce processus d’apprentissage semble aller de soi. En réalité il n’est pas automatique, il fait partie de l’aventure, il peut t’emmener dans des voies stériles voire des impasses, il te faut rester vigilant, voici trois écueils à éviter.

D’abord, fuis les slogans et les croyances simplificatrices prêts à l’emploi qui prétendent expliquer le monde et la vie. Ta faculté de penser de manière autonome est alors primordiale, elle seule te permet d’affronter la complexité de la réalité que tu as vécue, loin des volontés d’endoctrinement. Elle seule transforme le vécu, même douloureux, en énergie positive qui restera disponible pendant toute ton existence.

Méfie-toi aussi de tes connaissances, paradoxalement ce n’est pas avec ton stock de savoirs que tu pourras transformer un vécu en expérience. Les connaissances sont parfois un obstacle dans ce processus, elles proposent un modèle de compréhension construit dans des circonstances différentes. Dans le contexte de ton vécu, ta sensibilité, ton aptitude à interconnecter des faits entre eux, interconnecter des faits et des idées, te permettront de méditer, re-méditer l’expérience vécue et tenter d’en faire une expérience enrichissante. 

Enfin et ce n’est pas le moindre des obstacles, méfie-toi de toi-même. Tu auras toujours tendance à vouloir conclure ta réflexion dans le sens qui te plaît, qui te convient, qui te dérange le moins. Ainsi, lorsqu’il s’agit de trouver la cause d’un événement, il est souvent commode de désigner l’autre comme responsable de la situation, cela est rassurant et évite de se remettre en cause. Le mensonge à toi-même est le plus imbécile des mensonges puisqu’il t’empêche de t’enrichir et de progresser, il est alors impossible de transformer le vécu en expérience.

Si tu transformes le vécu en expérience et l’inscris dans ta pensée consciente, tu pourras poursuivre l’aventure de la vie, éviter de répéter les mêmes erreurs, mieux te connaître et mieux comprendre les autres. Tu seras prêt(e) pour une nouvelle expérience, pour un nouveau commencement, un nouvel apprentissage.

Éveiller ta curiosité 
Pour conclure mon bavardage, je ne te propose plus d’éveiller ta curiosité intellectuelle. Elle est certes une qualité primordiale que j’ai tenté d’éveiller chez toi, mais elle n’était qu’une étape vers la curiosité ultime : être curieux de la vie, la tienne et toutes les autres vies. Je conclus par une citation de celui qui m’a inspiré tout au long de ces pages, Albert Schweitzer, « Ce n’est pas par une connaissance, mais par une expérience du monde, que nous arrivons à une relation avec lui ».